La simplification des fusions

LA SIMPLIFICATION DES FUSIONS

Le recours aux fusions a fait l’objet d’un toilettage dans le sens de la simplification.

Le 24 mai 2023, le gouvernement a adopté, en application de la loi n° 2023-171 du 9 mars 2023 (art. 13), une Ordonnance réformant le régime des fusions, scissions, apports partiels d’actifs.

Les dispositions de l’ordonnance et du décret s’appliquent aux opérations dont le projet est déposé au greffe du tribunal de commerce à partir du 1er juillet 2023 (Ord., art. 13 ; Décr., art. 10).

1°/ Le nouveau cas de dispense d’échange de titres en cas de fusion ou de scission

En cas de fusion ou de scission, les associés de la société absorbée ou scindée doivent échanger leurs titres contre ceux de la société absorbante ou bénéficiaire afin de devenir associés de celle-ci.

Une dispense d’échange de titres existe désormais :

  • En cas d’absorption ou scission d’une filiale à 100 %,
  • En cas de fusion ou scission entre sociétés sœurs détenues chacune à 100 % par la même société mère,
  • En cas d’auto détention de ses propres titres par la société absorbée ou scindée.

Un nouveau cas de dispense d’échange de titres, savoir :

dans l’hypothèse où les titres sont détenus par les associés des sociétés qui fusionnent ou qui se scindent dans les mêmes proportions dans toutes ces sociétés, lorsque ces proportions sont conservées à l’issue de l’opération.

2°/ Le nouveau régime du projet de fusion, de scission

2.1°/ La Publication du projet au registre du commerce et des sociétés (RCS)

Le projet de fusion ou de scission doit être déposé au RCS. La même disposition concerne le projet d’apport partiel d’actifs soumis au régime des scissions.

2.2°/ Les Modalités de publication du projet sur le site internet des sociétés participantes

Désormais la publication du projet peut être effectué sur le seul Site de la Société principale.

2.3°/ Le Contenu du projet d’apport partiel d’actifs soumis au régime des scissions

Le contenu du projet d’apport partiel d’actifs soumis au régime des scissions est allégé. Cela concerne :

  • Les modalités de remise des parts ou actions et date à partir de laquelle ces parts ou actions donnent droit aux bénéfices ainsi que toute modalité particulière relative à ce droit ;
  • Le rapport d’échange (parité) des droits sociaux et, le cas échéant, montant de la soulte ;
  • Les droits accordés aux associés ayant des droits spéciaux et aux porteurs de titres autres que des actions ainsi que, le cas échéant, tous avantages particuliers

3°/ La nouvelle possibilité de délégation de compétence ou de pouvoir entre sociétés par actions

La procédure de délégation permet de se dispenser de la réunion de l’AGE (ou de la collectivité des associés) de l’absorbante.

Les dirigeants doivent simplement établir un rapport écrit, dont le contenu est libre, qui est mis à la disposition des actionnaires ou associés.

Le régime de la délégation en matière de fusion est le suivant :

  • le rapport du commissaire à la fusion sur les modalités de l’opération doit être fourni un mois au moins avant la date de l’AGE ;
  • le dépôt au greffe du projet de fusion et la publicité de l’avis de fusion doivent également intervenir un mois au moins avant la date de l’AGE ;
  • s’il est fait recours à la publication sur le site internet du projet de fusion (qui permet de se dispenser de l’insertion d’un avis au BODACC et, le cas échéant, au BALO), celle-ci doit être réalisée pendant une période ininterrompue commençant au plus tard trente jours avant la date auxquelles l’organe compétent a décidé la fusion ;
  • les documents devant être mis à la disposition des actionnaires ou des associés au siège social de la société préalablement à la fusion (projet de fusion, rapport du commissaire à la fusion, rapports des dirigeants, comptes annuels, etc.) doivent l’être trente jours au moins avant la date à laquelle l’organe compétent est appelé à se prononcer sur le projet ;

Attention : toujours en cas de recours à la publication de ces documents sur le site internet de la société (qui permet de se dispenser de leur mise à disposition au siège social de celle-ci), elle doit être réalisée pendant une période ininterrompue commençant au plus tard trente jours avant la date à laquelle l’organe compétent est appelé à se prononcer sur le projet

Remarque : concernant le rapport du commissaire à la fusion, il conviendra de retenir la première des deux dates suivantes : date de l’AGE (ou de la réunion de la collectivité des associés) de la société absorbée ou date à laquelle l’organe compétent est appelé à se prononcer sur le projet de fusion, selon le cas.

4°/ Le nouveau régime des fusions « semi-simplifiées »

Une procédure de fusion « semi-simplifiée » est applicable en cas de fusion-absorption d’une filiale à 90 % ou intervenant entre sociétés sœurs détenues chacune à au moins 90 % par la même société mère.

Cette procédure présente un certain nombre d’avantages :

  • La dispense d’approbation de la fusion par l’AGE (ou la collectivité des associés) de la société absorbante, sauf demande de minoritaires (l’AGE ou la collectivité des associés de la société absorbée demeurant toutefois tenue d’approuver la fusion) ;
  • La dispense, pour l’organe de direction (ou les dirigeants) et le commissaire à la fusion et/ou aux apports, d’établir un rapport, à condition que la société absorbante fasse une offre de rachat aux minoritaires de la société absorbée avant la fusion.

4.1°/ L’Extension du régime des fusions « semi-simplifiées » aux fusions impliquant des SARL

Désormais, ce régime est également ouvert aux fusions impliquant des SARL uniquement ou des SARL et des sociétés par actions.

4.2°/ Les Modalités de calcul du seuil de 90 % en cas de fusion « semi-simplifiée »

Désormais, ce seuil doit être calculé par référence aux parts et autres titres conférant un droit de vote et non plus aux droits de vote eux-mêmes.

Les Conditions de détention lorsque l’une des sociétés sœurs est détenue à 100 % par la société mère

En insérant, immédiatement après les termes « sans en détenir la totalité », les termes « lorsque les dispositions de l’article L 236-11 ne sont pas applicables » (C. com., art. L. 236-12, nouv.), l’ordonnance confirme l’applicabilité du régime « semi-simplifié » aux cas dans lesquels la société mère détient 100 % du capital de l’une des sociétés sœurs participant à la fusion.

4.3°/ L’Extension du régime simplifié aux scissions entre sociétés par actions

Désormais, les scissions réalisées entre sociétés par actions peuvent bénéficier du régime simplifié.

4.4°/ L’Extension du régime des apports partiels d’actifs « simplifiés » aux opérations impliquant des SARL

L’ordonnance étend le bénéfice du régime aux opérations impliquant des SARL uniquement ou des SARL et des sociétés par actions.

5°/ La Redéfinition partielle de l’apport partiel d’actifs

L’ordonnance,

  • clarifie d’abord le fait que de tels apports peuvent comprendre des éléments de passif.
  • précise qu’un même apport partiel d’actifs peut être désormais réalisé au bénéfice de plusieurs sociétés. Cette précision permettra, en cas de pluralité de bénéficiaires, de ne diligenter qu’une seule et même procédure d’apport partiel d’actifs soumis au régime des scissions (un seul traité, etc.).

6°/ L’Introduction de la scission partielle en droit interne

6.1°/ La scission partielle désormais reconnue en droit interne

L’ordonnance introduit en droit français la figure de la « scission partielle ».

La scission partielle constitue une « déclinaison de l’apport partiel d’actifs » dès lors que la société apporteuse n’est pas dissoute à l’issue de la réalisation de cette opération. Elle s’en distingue toutefois puisque les titres émis par la société bénéficiaire en rémunération de l’apport ne sont pas attribués à la société apporteuse mais aux associés de cette dernière ; en cela, elle se rapproche du mécanisme de la scission.

La scission partielle présente ainsi d’indéniables avantages pour les entreprises dans le cadre de leurs opérations de restructuration.

Il est désormais possible d’attribuer les titres de la société bénéficiaire émis en rémunération de l’apport directement aux associés de la société apporteuse, sans que ces titres ne transitent dans le patrimoine de cette dernière.

Le projet d’apport partiel d’actifs « peut prévoir que les parts ou actions de la société qui apporte une partie de son actif, de la ou des sociétés bénéficiaires ou à la fois de la société qui apporte une partie de son actif et de la ou des sociétés bénéficiaires représentant la contrepartie de l’apport seront attribuées directement aux associés de la société qui apporte une partie de son actif.

6.2°/ Régime de la scission partielle

  1. La scission partielle n’est possible que dans le cadre des apports partiels d’actifs soumis au régime juridique des scissions.
  2. Le projet de scission partielle peut prévoir une attribution, au bénéfice des associés de la société apporteuse, des titres de la ou des sociétés bénéficiaires  Dans un tel cas, l’attribution de ces titres auto détenus interviendrait par réduction de capital ou par imputation sur les capitaux propres de la société apporteuse, le projet de scission partielle devant par ailleurs « préciser les modalités comptables de l’opération.
  3. Les critères sur lesquels cette répartition est fondée doivent être explicités.

7°/ L’Obligation aux dettes en matière de scissions et d’apports partiels d’actifs

En cas de scission, les sociétés bénéficiaires des apports résultant de la scission deviennent débitrices solidaires des obligataires et des créanciers non-obligataires de la société scindée en lieu et place de celle-ci et sans novation.

Par dérogation, le traité de scission peut prévoir que les sociétés bénéficiaires ne seront tenues que de la partie du passif de la société scindée ou apporteuse mise à leur charge respective et sans solidarité.

L’ordonnance précise que le montant maximal de l’éventuelle responsabilité solidaire de toute société concernée par la scission est limité à la valeur, appréciée à la date de prise d’effet de la scission, des actifs nets qui lui sont attribués.